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Rétrospective 2019 : le regard du CETRI

L’année 2019 s’est ouverte sur l’investiture à la présidence de Jair Bolsonaro au Brésil, et se clôt par les élections en Algérie, secouée depuis des mois par les manifestations du vendredi. Les tensions et contradictions entre la « droitisation » du monde, le dispositif électoral et le nouveau cycle de luttes sociales, ont été au cœur des analyses, missions et formations du CETRI.

Pays et transversales

Au cours de cette année, des élections, locales et/ou nationales, se sont déroulées entre autres en Colombie, en Bolivie, en Thaïlande et au Guatemala ; l’occasion pour le CETRI d’en rappeler le contexte socio-historique et les forces sociales en présence, et d’éclairer les conflits ou faux-semblants démocratiques à l’œuvre. Outre ces contextes nationaux, en raison de l’actualité et de leur signification, nous avons plus particulièrement été attentifs à quatre pays en 2019 : les Philippines, le Brésil, le Nicaragua et Haïti. Par ailleurs, un numéro d’Alternatives Sud, coordonné par Aurélie Leroy, Asie : des pouvoirs et des luttes, a été consacré aux offensives réactionnaires et aux résistances sur le continent asiatique [1].

Enfin, de manière transversale, le CETRI a continué à développer son expertise critique sur les logiques de l’humanitaire et du tourisme. Bernard Duterme, notre directeur, a d’ailleurs été très régulièrement sollicité sur cette dernière thématique cette année, en Belgique et en France.

États du travail et de la fiscalité

Le centième anniversaire de l’Organisation internationale du travail (OIT) a été l’occasion pour le CETRI d’interroger « l’avenir du travail » dont il est tant question. En donnant la parole aux militants, syndicalistes et universitaires du « Sud global », où vivent les trois quarts des travailleur•euses de la planète, les grand•es absent•es du débat, il s’agissait de repenser le travail avec et à partir de la périphérie de l’économie mondiale. L’accent a plus spécifiquement été mis sur les enjeux de la numérisation [2] et de l’économie sociale et solidaire (ESS) - l’ESS étant, depuis des années maintenant, l’axe central de notre travail d’accompagnement, coordonné par Jacques Bastin, de l’ONG belge Solsoc. Par ailleurs, Cédric Leterme a publié l’ouvrage L’avenir du travail vu du Sud - Critique de la « quatrième révolution industrielle », tandis que Frédéric Thomas, en collaboration avec Solsoc et Solidar, a coordonné une étude trilingue, accessible en ligne : L’économie sociale et solidaire à l’heure du travail décent.

Il nous a semblé intéressant de questionner le pendant du travail, à savoir le capital, notamment dans la forme où les scandales à répétition d’évasion fiscale le donnent à voir. Afin d’éclairer et d’appuyer la campagne du CNCD-11.11.11 pour la « justice fiscale », à partir du Sud, et en fonction de ses dimensions sociales, politiques, écologiques, de genre, etc., un numéro d’Alternatives Sud, Quelle justice fiscale pour le Sud ?, coordonné par Cédric Leterme, a été réalisé.

La maison brûle ?

Le réchauffement de la planète s’est imposé dans l’agenda de la « gouvernance mondiale »… à défaut de se traduire en stratégies concrètes à la hauteur du défi. Fidèle à sa grille de lecture, c’est en fonction de la triple perspective des inégalités, de l’injustice et des rapports Nord-Sud, que le CETRI a poursuivi l’exploration de cette question. Ce sont, entre autres, les modèles même de développement, en lien direct avec les enjeux climatiques, qui ont fait l’objet d’Alternatives Sud. François Polet a coordonné Quêtes d’industrialisation au Sud, et Laurent Delcourt, Les nouveaux territoires de l’agrobusiness. De plus, un travail d’accompagnement et d’expertise est en cours, pour l’ONG belge Entraide et Fraternité, autour de l’agroécologie dans quatre pays du Sud (Philippines, Guatemala, Burundi et Haïti) outre la Belgique, comme levier de changement et modèle alternatif.

Le printemps des peuples ?

Le CETRI avait commencé l’année en revenant sur l’Armée zapatiste de libération nationale (EZLN), à l’occasion du 25e anniversaire de son soulèvement au Mexique. Or, à l’automne, du Liban au Chili, d’Haïti à l’Algérie, en passant par l’Équateur et le Soudan, des révoltes populaires ont éclaté, se sont multipliées et intensifiées, au point de sembler embraser la planète. Les mouvements sociaux du Sud étant au cœur de notre travail, nous nous sommes bien évidemment intéressés à ces dynamiques protestataires, à la fois à partir de l’étude de cas particuliers (par exemple Haïti), des affinités de ces soulèvements, et en termes de genre ; en mettant en avant la présence importante des femmes au sein de ces mobilisations, et l’écho des combats féministes de ces derniers mois qui souvent les habitent.

En première instance, c’est l’intensité et le devenir de ces luttes qui détermineront ce que sera 2020.


Notes

[1Notre travail 2019 a été rendu possible par l’engagement de nos traductrices et traducteurs : Maurice Hérion, Nicolas Thommes, Christian Pirlet, Anne-Françoise Denamur, Ignace Hecquet, Anaïs Spagnut, Ana Elia Wayllace, Paul Géradin, Nancy Matis, Amandine Gat, Lydia Zaïd, Anne Vereecken, Laurence Vanpaeschen, Isabelle Jeminet, Guillaume Lejeune, Gauthier Lesturgie. Que cela soit ici l’occasion de les remercier à nouveau.

[2Un Alternatives Sud sera consacré à ce thème en 2020.


Les opinions exprimées et les arguments avancés dans cet article demeurent l'entière responsabilité de l'auteur-e et ne reflètent pas nécessairement ceux du CETRI.